Critique de notre épistémologie dominante

Résumé de l'article Hermès ou la pensée du retour de Jean-Pierre Sironneau du livre « La galaxie de l'imaginaire, dérive autour de l'oeuvre de Gilbert Durand » -Berg international-

J.P Sironneau y résume les 4 moments principaux de l'entreprise anthropologique de Gilbert Durand qui sont:

- la critique de notre épistémologie dominante

- l'origine de la « défiguration » occidentale

- les conditions du retour à un nouvel esprit anthropologique

- ce que peut être une science de l'homme de notre temps

Critique de notre épistémologie dominante :

Critique des positivismes

« Depuis Descartes le signe l'emporte sur le symbole, le règne de l'algorithme mathématique s'instaure ». Au XIX^ème siècle, avec l'industrialisation galopante, il n'y a place que pour la science positive, « seule l'exploration scientifique est une connaissance véritable, pour le positivisme, le principe essentiel d'explication réside dans la causalité détreministe ».La causalité mécanique devient modèle pour la connaissance en général.

« En résumé, l'on peut dire que la dénonciation des causes finales par le cartésianisme et la réduction de l'être au tissu des relations objectives qui en est résulté a liquidé dans le signifiant tout ce qui était sens figuré, toute reconduction à la profondeur vitale de l'appel ontologique ».

Critique de l'historicisme

Par historicisme il faut entendre ici que l'historicité tend à devenir la source principale du sens. Nos historiens ont systématisé totalitairement le devenir de l'homme et des sociétés en une philosophie de l'histoire fortement ethnocentrique et colonisatrice des cultures « archaïques ». Il y aura un sens de l'histoire à partir du rationalisme occidental avec ses sciences et ses techniques qui apparaîtra comme un Progrès réduisant l'Homo sapiens au déterminisme totalitaire d'un temps unique hypostasié, celui de « l'évolution antropique » de la matière.

Le progrès technique devient le paradigme de tout perfectionnement, même moral. D'autre part le relativisme historique ruine tout fondement de la vérité et abouti à l'agnosticisme généralisé.Les conséquences en sont que le passé est toujours considéré comme étant inférieur, que d'autres cultures sont jugées comme dépassées et tout cela conduit à la célébration de la puissance matérielle et à justifier l'oppression, la conquète, voire le génocide. Dans la structure progressiste et messianique on doit voir « la volonté d'accélérer l'histoire et le temps afin de les parfaire et de s'en rendre maître ».

Ci-dessous, le 4ème aragraphe de la critique de l'hitoricisme de J.P Sironneau. Il pointe avec profondeur l'antinomie foncière du vécu du temps de l'homme de la tradition par rapport à celui de l'homme du progrès :

« Mais cette rêverie de la maîtrise du temps ne se manifeste pas de la même façon dans toutes les cultures : l'effort essentiel de beaucoup de cultures traditionnelles n'est pas de construire une histoire objective, extérieure aux consciences individuelles, et qui serait source de sens, mais bien plutôt de réintégrer l'évènement historique contingent dans une métahistoire, voire une hiérohistoire où il trouve seul son sens : l'histoire alors se dédouble, d'une part en une histoire plus ou moins objective - et si relative! - qui ne ''regarde'' pas l'homme et que nos ''sciences sociales'' ont commis l'erreur de placer au fondement de toute destinée humaine, d'autre part en une histoire ''existentielle'' ou mieux un destin sacré où les subjectivités s'emboîtent et se prédestinent en une surdétermination symbolique d'où émerge le sens.»

Critique du réductionnisme

Pour Gilbert Durand, « il est illusoire de recourir à un facteur prédominant pour rendre compte des systèmes socioculturels, dans leur totalité ou dans leurs parties. Bien des successeurs positivistes eurent vite fait de réduire le "Grand Etre" aux bornages du milieu, de la race et du moment ou encore plus totalitairement aux ''contraintes'' et à la ''pression'' collective ».

Gilbert Durand dénonce le réductionnisme latent chez beaucoup de nos contemporains : Freud qui délaisse le signifié au profit de la biographie personnelle et la cause libidinale ; Claude Lévy Strauss qui tend à réduire le mythe à un simple "jeu structurel", à en faire un "outil logique" utilisé à des "fins sociologiques".

Michel Eliard.